Ferran Adrià encourage Andorre à exprimer son identité culinaire, à planifier son développement et à se faire connaître en tant que destination touristique

Inquiet, créatif et capable de déconstruire toute affirmation catégorique par une question, Ferran Adrià a été justement récompensé par le Prix Andorra Taste lors de cette édition 2025. La remise du prix a été présidée par le ministre du Tourisme et du Commerce du Gouvernement d'Andorre, Jordi Torres, en présence également de Benjamín Lana, directeur général de Vocento Gastronomía, qui a rappelé qu’Adrià n’est pas seulement le chef qui a révolutionné la cuisine mondiale en l’amenant à la contemporanéité, mais aussi “la personnalité espagnole la plus influente dans le monde au cours des cent dernières années”.

Loin de se satisfaire de ce statut, Adrià, fidèle à lui-même, a lancé une rafale de questions et de défis à l'auditoire qui remplissait l'Auditori Prat del Roure, lors d'une conférence qui a clôturé une brillante matinée de présentations. Actuellement professeur et membre du conseil consultatif du Madrid Culinary Campus (MACC), le chef a souligné plusieurs points importants pour qu'Andorre s'impose comme une destination gastronomique. « Tout d'abord, a-t-il déclaré, il faut planifier, être prêt à investir et à travailler, et rechercher sa propre identité culinaire.

« Il faut travailler avec des données, car celles-ci nous permettront d'agir par la suite, et il faut regarder autour de soi. La France est un modèle à suivre. En Andorre, vous avez la possibilité d'élaborer un plan, et il est nécessaire de le faire. Selon les chiffres dont nous disposons en Espagne, la gastronomie représente aujourd'hui plus de 28 % de l'économie du pays. La gastronomie joue donc un rôle stratégique dans la politique, mais ce sujet n'est pas abordé lors des congrès », a-t-il souligné. Il a insisté sur la nécessité de planifier et d'investir avec discernement, citant l'exemple de la Thaïlande, pays « le plus en vogue au monde sur la scène gastronomique, devant le Pérou ou le Danemark ». Il a insisté sur la nécessité de planifier et d'investir avec discernement, citant l'exemple de la Thaïlande, pays « le plus en vogue » au monde sur la scène gastronomique, devant le Pérou ou le Danemark. L'année dernière, a-t-il ajouté, la Thaïlande a investi 20 millions de dollars pour faire connaître sa gastronomie au monde entier, et cela s'est reflété dans son classement, car pour être numéro un mondial, il faut investir. »

Pour Adrià, le parcours vers le positionnement d'une destination gastronomique « commence par un plan. Tout comme un restaurant doit établir son plan d'affaires, savoir à quel public il s'adresse, ce qu'il va offrir et ce qu'il va gagner, une destination doit faire de même, et elle doit commencer par connaître son identité gastronomique. » À cet égard, il a souligné le travail conjoint avec Vocento Gastronomía pour élaborer un plan stratégique en faveur de la gastronomie andorrane. « C'est un outil fondamental, et le document de base dira probablement beaucoup de choses que je suis en train de dire », a-t-il ajouté.

Selon Adrià, le travail culinaire doit commencer par la définition de l'identité gastronomique. « Qu'est-ce que la cuisine andorrane ? Celle que l'on mange en Andorre ou la cuisine traditionnelle andorrane ? » a-t-il demandé, avant d'ajouter : « Tout d'abord, il faut faire une revue historique, voir ce qu'est la cuisine traditionnelle andorrane, et prendre cette cuisine comme base pour créer une cuisine créative et conviviale. »

Lors des précédentes éditions du congrès, l'Andorra Taste Award a été décerné à Carme Ruscalleda, autre référence de la cuisine catalane et mondiale, ainsi qu'à deux chefs de renommée internationale : Michel Bras, véritable précurseur de la haute cuisine végétale, et Gastón Acurio, qui a valorisé et fait connaître la cuisine traditionnelle péruvienne dans le monde entier.